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L'odeur de la rose

Emma est heureuse, maman l'a chargée de renouveler le bouquet de fleurs du salon. C'est un travail délicat. Il faut choisir de longues tiges car le vase est profond.

Emma va chercher un sécateur dans la resserre et un panier à fond plat dans lequel elle couchera ses fleurs pour ne pas les écraser.
Elle coupe des marguerites et des iris - blanc et bleu, c'est joli. Elle hésite devant le rosier grimpant qui couvre le mur au fond du jardin comme une tenture de pétales. Une merveille. Les roses sont nacrées, avec quelques traces orange et elles embaument. Il est interdit de les cueillir, on ne peut couper que les fleurs fanées qui épuisent le rosier.
Emma pose son panier et ramasse quelques pétales tombés:
"Coucou, Emma, cueille moi aussi," dit une petite voix au-dessus d'elle.
Emma surprise, se redresse et se trouve nez à nez avec une rose magnifique, à peine entr'ouverte:
"En vérité, tu me regardes mais tu ne peux pas me voir" - reprend la voix, "Je suis l'odeur de la rose. Mes pétales ne sont que ma robe et je mets un temps fou à en sortir. Tu m'aiderais en me cueillant. D'habitude, c'est le vent qui me déshabille, je l'aime beaucoup, c'est une vraie nounou avec des gestes très doux. Toi aussi tu es habile ..il y a un bon moment que je t'observe."
-"Mais c'est interdit de vous prendre, Maman va me gronder."
-" Ecoute, Emma, ma vie est courte J'aimerais visiter ta maison. Toute seule, je n'en peux atteindre que le seuil. Si tu me mets dans ton bouquet, j'aurai assez de force pour monter jusque dans ta chambre. Je volerai autour de toi, tu pourras me respirer toute la nuit et tu feras de jolis rêves." Emma, séduite, coupe la grosse rose et l'installe dans un verre d'eau sur son petit bureau. Elle éclaire la chambre comme une lampe. Maman a seulement dit:" Comme elle est belle ! Je comprends que tu aies eu envie de l'avoir près de toi."
Le soir, Emma caresse la corolle aussi douce que ses joues et murmure : "-Ne vous ouvrez pas trop vite, Rose, je suis bien avec vous. A demain." Elle a l'impression de s'endormir dans le rosier, à la belle étoile, environnée de marguerites qui scintillent comme la voie lactée.
La rose n'en finit pas de s'épanouir. Son parfum règne dans la chambre et accompagne Emma dans la maison au gré des courants d'air. Papa lui-même a dit :
" Cette odeur, quel enchantement après celle de la ville! Tu as bien fait de couper cette rose, ma fille, je n' aurais pas eu le temps d'aller la respirer au fond du jardin."
Au salon, le parfum de la rose rejoint celui de l'iris. Ils dansent autour des objets comme ils dansaient dans le jardin. Basile, le chat, les voit aussi, Emma en jurerait, car il suit de ses yeux mi-clos les jeux d'ombre et de lumière qui tournent dans la pièce et ronronne quand Emma le prend dans ses bras pour valser joyeusement. Les marguerites s'écarquillent tant qu'elles peuvent dans leur vase pour ne rien perdre du spectacle. "-Lala la,! chante Emma en tournant de plus en plus vite. Elle a le vertige, Basile aussi qui miaule un peu, alors elle se laisse tomber sur une chaise, au bord de l'étourdissement. Il lui semble entendre le rire léger de la rose dans ses oreilles bourdonnantes.
Le lendemain soir, la petite voix reprend:
-" Je vais te confier un secret. Demain ma corolle sera tombée, on me croira morte...En vérité je ne serai qu'absente, le vent aura emporté mon parfum , avec celui des autres fleurs, nous allons faire le tour du monde. C'est un long voyage. Au revoir, Emma, Je suis heureuse de t'avoir connue."

Au matin, Emma rassemble les pétales répandus et les range en petit tas dans son armoire entre ses vêtements.
-"Pourquoi fais-tu cela? demande Maman.
-"Pourquoi pas, répond Emma, c'est le linge de la Rose".