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Yvette Dallemer aime écrire depuis toujours : en témoignent, dès 1965, ses Chansons vaines, en 1996, Albedo, qu'elle fait paraître chez l'Amourier, ou encore Parlando chez Tac-Motifs et tout récemment ce conte bref, Zonzolando, histoire d'un cerf-volant amoureux de la lumière et de sa " propre ombre " illustré comme ici par les dessins de l'auteur...
Elle est aussi une grande et fervente lectrice, lectrice de poésie, de la poésie contemporaine en particulier, française et étrangère - je connais son admiration pour Séféris.

104 pages, 21 x 21
ISBN 978-2-916723-12-9 - 18,00 €

Et l'on est étonné, conversant avec elle, du vaste champ de ses lectures, depuis la Bible par exemple, dont elle a une connaissance très sûre, très intérieure, jusqu'à Segalen, dont cette amoureuse des voyages et de l'exotisme parle avec la sympathie qu'inspirent les vraies rencontres. Faut-il ajouter que son propre imaginaire, et certainement ses rêves, sont nourris du souvenir des pays qu'elle a habités : l'Algérie, sa terre d'origine, et la Guyane, dont elle parle avec l'émotion qu'on a pour les terres de mystère où l'on a vécu heureux.
Tout cela agit très certainement, en sourdine, dans cet abécédaire animalier, et donne vie, et chaleur à la fantaisie d'Yvette Dallemer.
Vous y rencontrerez par exemple, à côté des animaux familiers d'Europe qui peuplent ces contes - le hérisson, les cigales, la chauve-souris, le lapin... -, d'autres figures chargées du prestige des pays lointains, kinkajou, tatou, quetzal, et des plantes comme le frangipanier.
Ne cherchez pas cependant dans ces évocations les éléments d'une sorte de projet d'enseignement indirect d'une faune et d'une flore exotiques, pas plus du reste que ces récits ne visent, comme on le voit souvent dans les contes ou les fables, à énoncer, indirectement toujours, les principes d'une éducation morale.
Là n'est pas l'objectif de l'auteur, même si la récurrence du même thème dans beaucoup de dénouements - le mariage, comme l'épilogue d'une rencontre où l'on " tombe " toujours " éperdument amoureux ", où il suffit le plus souvent de simplement se voir pour s'aimer - laisse entendre que dans ce monde rêvé des contes, l'amour résout tous les conflits... S'il devait y avoir une " leçon ", très discrète, à tirer de ces situations, ce serait celle qu'énonce le principe inscrit dans une bouteille à la mer échouée sur un rivage : " Qui que vous soyez, hâtez-vous d'aimer ".
Du reste, très rares sont les scènes de cruauté comme celle où le frelon attaque sauvagement une génisse. La tendresse, la générosité, l'entraide -voyez cette baleine qui joue les sauveteurs en mer - travaillent à la concorde.
Non, c'est bien la fantaisie qui guide la main d'Yvette Dallemer et qui lui inspire de jolies scènes dont les images ne manquent pas de charme : voyez ces zèbres attachés à compter leurs rayures, ces cigales qui "scient la lumière", ces chauves-souris " qui volent sans plumes ", ce renard qui contemple émerveillé les cailloux du fond de la rivière éclairés par la lune, cette araignée qui invente, en tissant sa toile, le motif d'une rosace pour l'architecte de la cathédrale. Voyez comment, image idéale du travail accompli, image peut-être de l'écriture à laquelle il faudrait tendre, voyez comme la petite Li tresse son chapeau d'osier: elle l'achève avec tant de perfection que le chapeau retourné peut servir de barque sur la rivière. Mais surtout elle l'accomplit tout du long avec tant de justesse que ses gestes lui inspirent des chants aux variations infinies.
Beau rêve d'harmonie.
Jean-Marie Barnaud